Amine B.
La première chose que je peux vous dire sur Marrakech c’est que c’est une ville où l’accessibilité aux personnes en situation de handicap est inexistante. Ni dans l’administration, ni dans les lieux publics. Je trouve qu’il n’y a pas de considération envers ces citoyens. Il n’y a même pas d’endroits où ils peuvent étudier, se former ou travailler. En plus, une grande partie de ces personnes sont jeunes et ont du potentiel. Des classes inclusives ont été mises en place pour les personnes en situation de handicap, mais dans toute la ville on ne trouve que trois ou quatre écoles qui proposent ça. Je connais celle de Mhamid, de Mdina et de Daoudiate. Mais les gens qui habitent loin de ces quartiers, ils doivent faire comment ? Les taxis ne s’arrêtent pas toujours pour les prendre, et dans les bus on ne peut pas monter avec un fauteuil roulant, alors ils font comment ces gens ?
De toute façon, le problème de l’enseignement est global. D’abord le problème des classes avec 40 à 45 élèves. Ensuite le problème du préscolaire. L’Etat ne couvre pas du tout cette phase de l’enseignement et il faut payer de sa poche. Celui qui a deux ou trois enfants ne peut pas se permettre de débourser 350 dirhams par enfant, chaque mois. Et encore, dans ce genre de garderies, ils restent juste assis les bras croisés. Ce ne sont même pas des établissements de qualité. Et c’est là que se creusent les inégalités sociales. Celui qui a les moyens offre une bonne maternelle à son enfant et évidemment quand il arrive au primaire il garde toujours une longueur d’avance sur celui qui n’a pas connu le préscolaire.
De toute façon, les inégalités à Marrakech il n’y a que ça. Ici, il n’y a que des gens riches et des gens pauvres. Au milieu, rien ! Et puis la vie est de plus en plus chère. Avant on pouvait aller à Jamaa El Fna et consommer quelque chose à six ou sept dirhams. Aujourd’hui tu ne peux rien acheter à moins de 30 dirhams.
D’un autre côté je veux souligner la pression qu’il y a au niveau des urgences d’Ibn Zohr et qui nécessite une solution. Et aussi les lacunes en infrastructures. Des quartiers ont encore des problèmes d’eau et de gestion des déchets. Quand on se balade dans les quartiers touristiques, c’est nickel mais dans les autres quartiers c’est une toute autre histoire.
Sur le plan économique, on peut dire que Marrakech est à l’arrêt avec la crise du covid. Les bazars, les hôtels, les transports… tout est à l’arrêt ! Il faut dire aussi qu’on ne mise pas beaucoup sur le tourisme intérieur à Marrakech. On travaille uniquement avec des touristes étrangers. C’est dommage. Et il faut préciser que ce ne sont pas les propriétaires de ces business qui souffrent le plus, eux ils ont certainement des choses de côté. Ceux qui souffrent le plus ce sont les journaliers qui travaillent dans le secteur et qui souvent, n’ont aucune couverture sociale. Tout ça ne présage rien de bon, et je prie pour qu’on s’en sorte.
En raison du confinement lié à la pandémie de Covid-19, l’initiative 100 Villes, 100 Jours a été organisée par visioconférence à partir de la 59e étape. Ce sont ainsi les habitants de Marrakech qui ont été les premiers à tester ce nouveau dispositif.
Connectés simultanément avec les membres de la caravane des Indépendants, 171 participants ont pris part à cette réunion virtuelle pour débattre de la ville et de son futur. La cité impériale, qui compte parmi les plus belles destinations au monde, fait la fierté de ses citoyens et suscite de nombreuses recommandations.
Bien entendu, le tourisme est l’activité phare et chacun s’accorde à dire qu’il est important d’entretenir l’attractivité de Marrakech. Pourtant, les habitants soulignent qu’il ne faut pas oublier les quartiers plus populaires de l’ancienne médina et du reste de la ville, où la population se sent parfois marginalisée.
De même, il est recommandé de diversifier l’activité économique au-delà du tourisme, en soutenant par exemple les industries agroalimentaires ou l’artisanat. Cette attente répond à la problématique de la saisonnalité de certains emplois et s’est trouvée renforcée par les premières conséquences de la crise liée au Covid-19 au moment de la réunion. Développer de nouvelles activités pour réduire le chômage, notamment des jeunes, est un objectif prioritaire des citoyens.
Enfin, les participants ont largement signalé le manque de moyens du service public pour la santé et l’éducation. Selon eux, les établissements médicaux disposent de quelques bons médecins, mais c’est très insuffisant pour tous les habitants de la ville. Le centre hospitalier universitaire semble notamment manquer de personnel et d’équipements pour jouer pleinement son rôle. De même, les écoles publiques ne sont pas assez nombreuses pour accueillir tous les élèves et ces derniers sont menacés par la déscolarisation.
Pour les habitants, ces constats sont indignes d’une ville telle que Marrakech et des progrès doivent être réalisés rapidement.