Ligue des champions : La victoire du cœur et du courage

Le Wydad de Casablanca, nouveau champion d’Afrique, a prouvé une vérité aussi vieille que le football : Avec la foi et le courage, on peut battre n’importe qui. Alors que peu de spécialistes misait sur les Casablancais, ces derniers ont donné une leçon d’humilité et de volonté à tous, en venant à bout de la grande formation égyptienne d’Al-Ahly. Les différences techniques et humaines entre les deux équipes ne souffraient aucun doute. D’un côté, Al-Ahly compte dans ses rangs l’ossature de la sélection égyptienne qualifiée à la Coupe du Monde en Russie et finaliste de la CAN-2017. Un club sacré huit fois champion d’Afrique et ayant disputé deux autres finales, outre une vitrine de trophées pleine à craquer. De l’autre, le Wydad est, certes, une valeur sure du football national, mais il n’a pas une longue histoire africaine. Quoique vainqueurs de la dernière Botola, les joueurs casablancais font encore leur apprentissage sur le continent, malgré une demi-finale perdue, en 2016, contre un autre club cairote, en l’occurrence le Zamalek. Décriés un peu partout à cause d’un début de saison en demi-teinte, les joueurs ont fermé les oreilles aux critiques. Ils ont fait bloc derrière leur entraîneur Houcine Ammouta, qui s’est bizarrement départi, ces derniers jours, de son flegme et de sa réserve pour monter au créneau dans la presse afin de défendre ses troupes et leur remonter le moral. Pour cette finale retour de la Ligue des Champions, samedi soir au complexe Mohammed V, la tactique a visiblement bien marché. Après un premier quart d’heure de piètre qualité, durant lequel ils n’arrivaient pas à aligner trois passes de suite, les Rouge et Blanc ont commencé, petit à petit, à surmonter le mur de la peur. Les camarades du capitaine Brahim Nekkach étaient tétanisés par l’enjeu plus que par le jeu. Ammouta, le « novice », a joué un mauvais tour à son adversaire, le « grand » Houssam El Badry, qui, par arrogance ou manque de discernement, a condamné ses éléments à une incroyable débauche d’énergie durant les 25 premières minutes du match. A la demi-heure de jeu, certains égyptiens tiraient déjà la langue, notamment le virevoltant Mouamen Zakaria, qui courait comme un fou sur son flanc droit. Le coach marocain, plus rusé que son confrère, a exploité comme il se doit la baisse de régime des Égyptiens, qui ne parvenaient plus à effectuer le repli défensif avec la même aisance qu’au début. Puis, El Badry va commettre une erreur tactique monumentale, en sortant l’attaquant marocain d’Al-Ahly, Oualid Azaro, qui, même en méforme, donnait du fil à retordre à la charnière centrale du Wydad avec son jeu en pivot. Profitant des espaces laissés par les Cairotes, les Marocains devenaient plus menaçants. Et c’est là où la classe d’un certain Achraf Bencherki va faire mal. Le jeune attaquant, incontestablement meilleur joueur de la Ligue des Champions, a été une nouvelle fois décisif. Après avoir égalisé au match aller, il a été à l’origine du but libérateur marqué par Walid El Karti, à la 69ème minute de jeu. La victoire du Wydad est celle du cœur, d’un groupe de jeunes marocains ayant cru jusqu’au bout en leurs chances, d’un entraîneur « Made in Morocco » privilégiant le travail sur les palabres et d’une direction ayant accompli le devoir qui est le sien. Cerise sur le gâteau, Ammouta, déjà vainqueur de la Coupe de la Confédération avec le FUS de Rabat en 2010, est devenu le premier entraîneur marocain à remporter la Ligue des Champions, rejoignant le club très fermé des techniciens ayant enlevé le titre dans deux compétitions continentales différentes, à l’image des légendaires Mahmoud El Gouhary (Égypte) et Faouzi Benzerti (Tunisie). L’équipe, les supporters et la direction du Wydad voulaient absolument arracher le trophée pour réserver une place au Mondial des clubs, en décembre aux Émirats arabes unis et, partant, gagner une stature mondiale comme leur grand rival du Raja. Comme quoi la concurrence entre les deux mastodontes de la métropole est salutaire pour le football national. MAP