Karim H.
Nos besoins concernent la santé, l’enseignement et l’emploi. Trois droits garantis par la constitution, article 31 !
Nous avons un gros problème de personnel médical. J’habite Oued Zem et tous mes enfants sont nés à Khouribga. Pourquoi ? Parce qu’on n’a pas de maternité ici. Théoriquement on l’a, mais ils ne font que renvoyer les gens. Ils prétextent par exemple une anémie chez la mère, sans même l’ausculter ou essayer de la prendre en charge. Le souci est que beaucoup viennent de la campagne pour accoucher à Oued Zem. Certaines femmes viennent de Smaâla ou Bni Khayran et on leur demande d’aller jusqu’à Beni Mellal ou Khouribga. Parfois, ça peut être fatal pour la mère ou son enfant ! Sans parler de l’ambulance qui ne va pas la transporter gratuitement. On ne comprend pas pourquoi les césariennes se faisaient avant à Oued Zem et plus maintenant ?
Pour moi, le secteur de l’enseignement a besoin d’être revu au niveau national et pas juste à Oued Zem. Ici, c’est le même problème du manque de ressources humaines. Je parle de personnes compétentes en qui les parents peuvent avoir confiance. Et il faut revoir toute la structure de l’enseignement. Pour faire simple, les parents commencent à fuir l’école publique, alors ils payent une école privée mais doivent en plus payer les heures supplémentaires puis rentrer le soir pour travailler encore avec leurs enfants pour espérer qu’ils aient un niveau correct… Il y en a assez !
Le transport pose également problème. Les étudiants qui prennent l’autocar pour aller à la faculté de Khouribga n’ont pas de tarif spécial. Certains payent jusqu’à 500 dh par mois de transport. C’est énorme pour un étudiant !
En ce qui concerne l’emploi, nous avions auparavant une usine de textile, la régie des tabacs et une société d’engrais, mais elles ont toutes fermé et il n’y a pas eu d’autres projets. Alors, nous avons un quartier industriel qui n’existe que sur le papier. Il n’y a que le nombre de lotissements qui croît.
La dix-huitième étape de l’initiative 100 Villes, 100 jours a mené la caravane des Indépendants à Oued Zem, où l’attendaient 400 participants. L’histoire de la commune, marquée notamment par la lutte pour l’Indépendance et les évènements tragiques qui ont eu lieu lors du deuxième anniversaire de l’exil de feu Sa Majesté le Roi Mohammed V (20 août 1955), est très présente dans l’esprit de ses habitants. Les performances de l’équipe de football phare de la ville, le Rapide de Oued Zem, est aussi une composante importante de l’identité des habitants et source d’une grande fierté.
Les participants expliquent que depuis la fermeture de la seule usine de filature de coton de la région, il y a quelques années, la commune qui a continué à croître démographiquement, est en manque cruel d’opportunités d’emploi et les conditions de vie s’y sont énormément dégradées. La pauvreté s’étend dans la ville et se concentre en particulier dans les bidonvilles.
Oued Zem ne profite pas de la proximité de Khouribga, ni des mines de phosphates, ce qui accentue la frustration des habitants et plus particulièrement les jeunes, qui ne trouvent pas d’emplois décents et se tournent parfois vers l’émigration clandestine pour échapper à ce contexte difficile. Afin de relancer l’activité, les participants en appellent au soutien de l’Etat, pour encourager les entreprises dans les secteurs industriel et agricole, mais aussi pour lutter contre certains dysfonctionnements de gestion, qui nuisent au développement économique.
Les citoyens évoquent également la thématique de la santé. Ils s’étonnent qu’une ville si peuplée ne bénéficie pas d’un hôpital équipé, avec suffisamment de personnel pour répondre aux besoins de la population. Au contraire, ils racontent que les femmes doivent accoucher à Khouribga et que plusieurs sont décédées à cause du manque d’infrastructures à Oued Zem. De plus, beaucoup de voix s’élèvent contre la mauvaise gestion des services médicaux, où le clientélisme et le favoritisme sont dénoncés, tandis que les bénéficiaires du Ramed se disent exclus.
Enfin, le secteur de l’éducation n’échappe pas non plus aux critiques. Là encore, la commune est sous-équipée, avec trop peu d’établissements scolaires et d’enseignants. Ces derniers sont parfois pointés du doigt pour leur manque d’engagement, même si chacun reconnaît la difficulté de devoir gérer des classes en sureffectif. Au-delà du lycée, les habitants regrettent l’absence de formations supérieures, ce qui oblige les jeunes à se rendre dans d’autres villes pour étudier. Beaucoup n’en ont pas les moyens et se voient contraints d’arrêter leur cursus.