Mohamed M.
La priorité ici c’est l’emploi. Essaouira compte principalement sur la pêche et le tourisme. On avait une dizaine d’usines avant, de cuir, de farine. Elles ont toutes fermé. Plus d’industrie ! Il reste uniquement deux usines de poisson. Nous n’avons plus beaucoup d’opportunités de travail et la situation s’est aggravée encore plus avec “Corona”. Parce que même le tourisme, qui sauvait un peu la situation, s’est arrêté net. Le festival n’a pas eu lieu, pareil pour les autres événements culturels et sportifs. Et l’artisanat a connu un coup d’arrêt aussi, puisqu’il dépend du tourisme.
On souhaite vraiment que l’autoroute qui arrive jusqu’à Safi soit prolongée jusqu’à Essaouira. Si vous passez par la route côtière actuelle, je peux vous assurer que vous aurez peur pour votre vie. La route est dégradée et il y a toujours des accidents. Et en réalisant ce projet, il est certain qu’une dynamique touristique se créera et des opportunités de travail verront le jour. Imaginez une autoroute qui commence à Tanger et arrive jusqu’à Essaouira, vous réalisez le nombre de personnes qui seront motivées à venir ? C’est évident. Lorsqu’il y a une infrastructure solide, on peut espérer développer le tourisme.
Pour la pêche, le port a été élargi mais ça reste insuffisant. Quand c’est la période des anchois, les bateaux commencent à se bousculer à Essaouira et il n’y a plus de place pour les locaux. Il y a aussi le problème du marché aux poissons. Les travaux avaient commencé, mais sont actuellement suspendus. J’ignore pourquoi…
D’autres lacunes concernent le secteur de la santé. L’hôpital Sidi Mohammed Ben Abdellah est souvent encombré. Vu qu’il n’y a pas vraiment de centres de santé dans les environs, tout le monde vient ici. Quand on va aux urgences, on reste des heures debout à attendre. Quand on demande un rendez-vous, il faut compter un délai de trois mois environ. Je ne sais pas si c’est un manque de médecins ou autre chose. Alors on n’a plus confiance en l’hôpital public. Ma femme accouchera bientôt et je sais que je vais l’emmener à la clinique. Elle aura les mêmes médecins de l’hôpital mais je sais qu’on y sera mieux accueillis et mieux traités puisqu’on paie.
Mais celui qui n’a pas les moyens, il fait comment ? C’est ça le problème.
En mai 2020, près de 200 habitants d’Essaouira ont participé à la réunion virtuelle organisée dans le cadre de l’initiative 100 Villes, 100 Jours. Cet échange avec les Indépendants, à propos de l’avenir de la commune, s’est avéré très fructueux: les participants sont très fiers de leur ville, considérée comme l’une des plus belles du Maroc, et souhaitent absolument la préserver. A commencer par sa célèbre médina, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Pour conserver son attrait touristique, tous estiment qu’il est indispensable de protéger son patrimoine historique, parfois délaissé, tout en soutenant des programmes culturels, dans le sillage du célèbre Festival Gnaoua. De plus, les citoyens voudraient être mieux reliés au reste du pays, avec l’arrivée du train ou le prolongement de l’autoroute depuis Safi, afin d’attirer encore plus de touristes.
En effet, l’ancienne cité de Mogador est très dépendante de cette activité saisonnière. En dehors de la pêche, les opportunités d’activité sont peu nombreuses et plusieurs usines ont récemment fermé leurs portes, tandis que l’artisanat n’est pas en mesure de proposer suffisamment d’emplois. Ainsi, depuis plusieurs années, le taux de chômage augmente à Essaouira, surtout chez les jeunes, et les participants soulignent l’importance de diversifier l’économie locale. Pour cela, ils recommandent d’encourager les porteurs de projets, en simplifiant par exemple les formalités administratives pour les entrepreneurs et en les accompagnant, à la fois financièrement et moralement.
Par ailleurs, le secteur public est également critiqué lors de la réunion. L’hôpital de la ville est débordé, car il manque d’équipements et de personnel depuis longtemps. Le dysfonctionnement du service des urgences inquiète l’ensemble des habitants. De même, la faiblesse des infrastructures est montrée du doigt dans l’éducation, avec des écoles encombrées et des filières de formations professionnelles trop peu nombreuses pour inciter les jeunes à rester à Essaouira.
Enfin, les citoyens insistent sur un dernier point important : l’accès au logement. Des progrès sont ainsi attendus pour que la population puisse vivre dans de meilleures conditions au quotidien.